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Le jeu de piano d'Or Solomon traduit de façon sensible le souffle de la parole, l'incite au dialogue, l'éprouve au point de la rendre plus profonde, tant par son élégance et sa virtuosité, que par sa conversation avec le sens de chaque parole. On a découvert sa façon si singulière de se mettre au service de la voix, de disparaître, se glisser, s'éteindre et éclairer de sa discrétion.
Or est aussi un improvisateur hors pair, sûr de son art.
Ses improvisations ne s'éloignent jamais de la composition.
On pressent chez lui l'obsession à se lier à une structure, à un ensemble, à une construction, une harmonie, une boucle, à un début de forêt, à une image forte. Prégnante. Ses notes, ses phrases mélodiques sont autant de langages, de paroles, de mots que des couleurs.
La construction spatiale de ses "Méditations" (titre qu'il donne à une série d'improvisations enregistrées) doivent beaucoup aux arts plastiques. Or Solomon peint avec ardeur et importance toute une imagerie sonore, un panorama d'aplats mélodiques et colorés, un bestiaire peuplée d'animaux mythologiques, de pensées soudaines, de pulsions instinctives. On n'est jamais loin dans ses récits des paraboles mythiques.
Son art, proche de l'expressionnisme abstrait, nous renvoie sans détour à l'innocence et la cruauté des rêves. Il improvise en composant des pièces instrumentales qui inventent des formes nouvelles, sortes de "chansons".
Dans son jeu, qu'il soit accompagnateur, soliste, improvisateur, ou arrangeur, Or Solomon entretient un lien très fort avec la composition populaire. Celle que l'on fredonne. Que l'on s'approprie. Qui nous appartient. Mais pas une chanson dans son format habituel. Autre chose. Réinventé à chaque fois. Or Solomon est, ce que l'on peut s'autoriser à appeler, un pionnier de "la chanson improvisée".